Ce n’est un secret pour personne que l’excision, en dépit de la loi de 2000 qui interdit la pratique et passible d’une peine allant jusqu’à cinq ans de prison, le mal reste très ancré dans les traditions, si bien qu’aujourd’hui encore, près de 95 % des femmes ont subi cette mutilation génitale. Selon plusieurs sources, la complexité de la lutte contre ce phénomène se justifie du fait qu’il y a toujours la complicité d’une proche de la victime ( Mère, Grand mère, tante…) qui, après l’acte, tente de jouer aux sapeurs-pompiers. Aucune famille, aucune ethnie, aucun enfant n’est à l’abri en République de Guinée.
Pour inverser ces données, ils sont nombreux de nos jours qui se battent à travers des campagnes, dénonciations, … A l’image de la Secrétaire générale du Club des jeunes filles leaders de Guinée, Kadiatou Konaté. « Elles sont nombreuses en Guinée qui ont subi cette pratique néfaste dans laquelle tout ou une partie des organes génitaux féminins sont retirés ou mutilés pour des raisons non médicales. C’est une violation des droits humains des femmes qui peut entraîner des conséquences dévastatrices sur leur santé, causant notamment des hémorragies, des infections , des complications en cours d’accouchement et dans des cas graves, la mort », a-t-elle décrit. Puis de soutenir qu’il y a d es années que :« le gouvernement et les institutions s’impliquent dans cette lutte, mais sans assez de changements.
La prévalence est de 94,5% chez les femmes de 15-49 ans et 39% chez les filles de 0 à 14 ans (EDS 2018).
Le plus souvent les exciseuses sont des personnes en âge avancées qui travaillent avec les proches des victimes. Les filles, tout âge confondu sont exposés à ce danger.
Face à ce mal, ils sont nombreux ceux qui ont l’impression que les autorités ont peur d’infliger des peines trop lourdes aux auteures » , a soutenu la jeune activiste, engagée dans la lutte contre les MGF en Guinée. « Tant que la justice n’est pas sévère avec les pratiquants de l’excision et leurs complices, il sera difficile de transformer positivement notre société dans ce domaine », renchérit Adama Kanté, enseignante et activiste engagée contre les MGF au cours d’une causerie au tour de l’abandon de la pratique.
Ceux qui pratiquent les MGF se fondent sur la religion pour justifier leurs actions alors que la question de la protection des enfants et des femmes est une prescription divine. C’est ainsi qu’Elhadj Aboubacar Sidiki Nabé, Directeur Adjoint du Bureau de Stratégie et de Développement du Secrétariat Général aux Affaires religieuses, dira : « Mon département a adopté une Fatwa interdisant la pratique des MGF en Guinée et mis en place une stratégie d’intervention des leaders religieux pour la promotion de l’abandon des MGF grâce à l’appui de l’UNICEF. A cette occasion, je réaffirme l’engagement de mon département à œuvrer constamment dans le cadre de la prévention du mariage précoce, le viol des petites filles, le travail des enfants et surtout la promotion de l’abandon des MGF ».
Fatou Diané vit à Coyah, c’est une jeune maman de deux enfants qui a été victime de l’excision et vit encore les séquelles de cette mutilation génitale. « Lors de ma première grossesse, ça a été compliquée… Le médecin m’a dit que c’était dû à l’excision », raconte-t-elle.
Sur la même lancée, Aïcha Diallo, la vingtaine, dit avoir pitié de ses filles,. sœurs. «Franchement, j’ai pitié de ces dernières. Elles sont encore victimes des coutumes que nos parents et compatriotes refusent d’abandonner en dépit de toutes les sensibilisations et autres luttes qui sont engagée ».
Tout récemment, des équipes du Club des jeunes filles leaders de Guinée, une ONG de défense des droits des femmes, sillonnait des quartiers de Conakry et certaines localités de l’intérieur du pays pour tenter de changer les mentalités, mais il y ‘a toujours résistance dans des nombreuses familles… Des parents qui ne veulent rien entendre, surtout ceux qui sont religieux. Il y en a même qui se permettent de chasser les agents sensibilisateurs quand ils commencent à leur parler de l’excision », a expliqué la jeune maman.
La Directrice nationale Genre et Equité du Ministère de la Promotion féminine, de l’Enfance et des personnes vulnérables, Mme Fatoumata Touré, de soutenir que le changement des normes sociales n’est pas toujours facile. « C’est au moment des grandes vacances où on enregistre plus de victimes chez les petites filles. Pendant cette période, les innocentes sont transportées au village ou dans les quartiers périphériques de la capitale pour se faire exciser à l’abri des regards. Oui, chaque année, pendant les vacances scolaires, des milliers de jeunes sont excisées dans tout le pays », a-t-elle signifié.
Le pays occupe ainsi le deuxième rang au classement mondial en ce qui concerne le taux de prévalence en la matière, derrière la Somalie, a ajouté Mme Fatoumata Touré. « Les MGF/E sont constitutives de plusieurs violations des droits fondamentaux. La lutte contre ce phénomène revêt donc une grande importance pour le gouvernement guinéen, les Nations Unies en général et pour le Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) en particulier. La communauté internationale a adopté des textes, fait des déclarations, élaboré des politiques et mis en place des plans d’action en vue d’éradiquer la pratique des MGF/E dans le monde… Mais les efforts restent vains pour le moment », a-t-elle dénoncé.
En raison de ces réalités que nous vivons en Guinée, la réalisation des objectifs de développement durable, notamment en ce qui concerne l’élimination des mutilations génitales féminines d’ici 2030, sera compromise, a estimé le Fonds des Nations Unies pour l’enfance(UNICEF).
Source : Billetdujour.com